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Avec l’association APAD, les jeunes deviennent le moteur de la reconstruction de leur pays

© APAD/CCFD-Terre Solidaire

Un pays instable marqué par de nombreux conflits

5ème pays africain le plus vaste grand comme deux fois la France, le Tchad bénéficie d’une situation stratégique entre l’Afrique du Nord et l’Afrique subsaharienne, et connait depuis son indépendance en 1960 une forte instabilité politique.
En effet, le pays enchaîne plusieurs guerres civiles entre 1960 et 1990, et est depuis présidé par Idriss Déby Itno. Cette relative stabilité masque une concentration du pouvoir entre les mains de groupes minoritaires armés, violents et corrompus. Ainsi la situation actuelle du pays reste potentiellement violente avec beaucoup d’armes en circulation et de nombreuses tensions anciennes (entre communautés, entre chrétiens et musulmans (qui s’atténuent mais qui structurent toujours la vie tchadienne), entre agriculteurs et éleveurs, etc.). Le contexte géopolitique du pays est également difficile (Boko Haram, AQMI, Darfour, Libye, Centrafrique, Sud Soudan).
Par ailleurs, l’économie du pays reste fragile (dépendance au cours du pétrole, etc.) ce qui entraîne des conséquences sociales importantes. Dans un contexte aussi difficile, la société civile locale peine à se développer et à se structurer, d’autant qu’elle est peu soutenue. Pourtant elle pourrait jouer un rôle de nature à apaiser les tensions sociales. Ainsi les jeunes par exemple, sont très investis dans leurs associations et réseaux, sont porteurs d’une autre vision du pays, mais ils ne disposent pas des outils et moyens pour jouer un rôle citoyen déterminant.

Miser sur la jeunesse pour reconstruire le pays

L’association APAD (Action de Partenaires pour l’Appui au Développement) encourage les associations de jeunes à participer à la construction d’un Tchad débarrassé de valeurs de guerre et de discrimination et à l’inverse les invite à une nouvelle citoyenneté partagée. Dialogue, formation, mobilisation permettent aux jeunes de s’exprimer auprès des politiques, de nouer des alliances dans leurs quartiers, villes, région.
L’APAD soutient les associations de jeunesse dans 15 villes du pays, et vise de façon spécifique le renforcement des capacités des jeunes (particulièrement les jeunes femmes) afin de mieux s’intégrer économiquement, socialement et culturellement dans leurs milieux de vie et devenir des acteurs dynamiques de changement social.

Avec le programme « Mon territoire, mon avenir : une jeunesse en marche pour la construction d’une conscience collective », l’objectif est de soutenir l’engagement des jeunes dans le renforcement de la résilience des sociétés locales à l’échelle du territoire pour tenter d’apporter des réponses concrètes et durables aux tensions.
Habituellement, les projets de soutien à la citoyenneté se contentent pour la plupart de former les jeunes sur la notion de droit, de constitution, de respect de la loi, de droits et devoirs du citoyen… La plupart des programmes ne sont que des successions de cycles de formation qui se répètent de villes en villes, mais sans mise en pratique. Ils sont utiles mais ne permettent pas de « réaliser » sa citoyenneté en étant utile aux communautés.
Le projet vise donc à mettre en action tout un ensemble d’associations de jeunes dans 3 territoires du Tchad. Il s’agit de permettre à cette nouvelle génération de prendre toute sa place dans la vie locale et d’être au cœur d’un nouveau contrat social local basé sur la confiance, la citoyenneté, la solidarité afin de tenter de résoudre pacifiquement les conflits qui minent tout effort de développement et d’émancipation sociale des populations et communautés dans ce pays si divisé.

Les réalisations

En 2018, pour la 1ère année, le programme a touché près d’un millier de jeunes pour leur permettre de dialoguer, de participer et/ou de porter des petits projets, de se former, de visiter d’autres régions et cultures du pays. Plus particulièrement des visites d’échanges et de partages d’expériences ont été effectuées dans 15 villes. Elles ont impliquées 317 jeunes (dont 96 filles) membres de 176 associations locales de jeunes.
Grâce au programme, l’APAD a suscité la mise en mouvement des associations de jeunes entre elles autour des discussions d’intérêt commun. Plusieurs activités ont été réalisées par les jeunes eux-mêmes contrairement à avant, où c’est l’APAD qui réalisait à la place des jeunes. A titre d’exemple on peut citer des activités de sensibilisation à la scolarisation des filles, à la lutte contre le mariage précoce, la réalisation de projets de forage ou d’assainissement, la mise en place d’activités sportives, des ateliers sur le comment vivre ensemble ou encore sur la protection de l’environnement.
Des nouveaux leaders non connus par l’APAD ont vu le jour et sont reconnus par les jeunes. Par ailleurs, le transfert de responsabilité de l’APAD vers les territoires a commencé, puisqu’en 2018 les jeunes ont réalisé toutes leurs activités par eux-mêmes sans la présence de l’équipe de l’APAD et les visites de fraternités et solidarités se sont déclenchées entre les jeunes sans la demande de l’APAD. Le programme a même réussi à relancer le mouvement associatif sur certains territoires. Des jeunes qui ne se rencontraient pas auparavant ont réfléchi et porté ensemble des actions.
A Kélo en juin 2019, c’est la plateforme de jeunes qui a organisé une journée de dialogue et de fraternité qui a rassemblé l’ensemble des acteurs de la vie sociale urbaine et rurale (partis politiques, religieux, agriculteurs, éleveurs, représentants de l’Etat, jeunes, femmes…) pour faire un état des lieux partagé et définir des stratégies pour résoudre les conflits qui traversent en permanence leur territoire. C’est cette plateforme de jeune qui va animer la suite de ce processus de fraternité et de paix.

Témoignage de Mariam Doungous, Secrétaire Général de l’association des filles pour la lutte contre la violence faite aux femmes à Melfi

« Ce programme donne l’opportunité aux jeunes de réfléchir et d’initier des actions conformément aux réalités locales contrairement aux ONG qui travaillent à Melfi dans le domaine humanitaire où tout est défini à Ndjamena avec un système mécanique « prévus et réalisés ». Avec l’APAD, nous nous sentons comme des acteurs de changement, puisque nous avons réalisé nos activités sans que l’APAD nous propose des thèmes. Nous pouvons mieux grandir avec l’APAD. »

Pourquoi la fondation soutient ce projet ?

Ce projet développe une approche globale de la citoyenneté en mettant l’accent sur la jeunesse qui est probablement la mieux à même de réformer le pays et instiller des changements durables.
Contrairement aux approches traditionnelles au Tchad et dans d’autres pays, ce projet veut confier à des associations de jeunes un rôle moteur, grâce à la responsabilisation et la mise en pratique.
Ce projet prend également en compte les communautés marginalisées et particulièrement les jeunes ruraux désœuvrés (à risque) et les femmes souvent laissées de côté des interventions de développement.

ENSEMBLE, accélérons la transition écologique et solidaire