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Voyager écoresponsable à l’heure du changement climatique

Article rédigé pour la Fondation Terre Solidaire par Marie Huré

Voyager écoresponsable est une nécessité face au changement climatique pour faire évoluer le tourisme vers un modèle moins émetteur. En effet, avec 11% des émissions de gaz à effet de serre (GES), le secteur du tourisme en France mérite d’être appréhendé différemment pour évoluer vers un modèle moins émetteur. Il en est d’ailleurs de même au niveau mondial avec 8% des émissions globales. L’enjeu est donc bien réel d’un point de vue environnemental mais pas que, puisque le secteur représente une part non négligeable du PIB pour un grand nombre de pays et emploi des millions de personnes sur tous les continents.

A travers les réseaux sociaux, les publicités, les médias ou même nos livres de chevet, les vacances et tout ce qu’elles englobent sont omniprésentes dans nos quotidiens. Et c’est à juste titre, car le combat pour acquérir le droit aux congés payés pour tous n’a pas été sans peine. Notre 5e semaine de congés payés n’a été acquise que depuis 1982, sous l’ordonnance de François Miterrand. S’accompagnant d’une injonction pour des vacances accessibles à tous, surtout l’été, à l’image d’un bien commun. Des centres de vacances font alors leur apparition et les lieux populaires sont de plus en fréquentés. Petit à petit, le tourisme de masse s’installe, avec les inconvénients que nous connaissons aujourd’hui comme la surfréquentation des lieux touristiques, l’avion low cost ou les infrastructures précaires.

L’imaginaire du voyage se construit autours de diverses composantes, plus ou moins réalistes. Voyager, c’est aller loin, être dépaysé, déconnecter, bronzer… tout ce qui permet de s’éloigner du quotidien. Dans ce contexte, il n’est pas aisé de proposer des alternatives séduisantes et accessibles. Pourtant, notre approche actuelle du voyage ne permet pas d’économiser les ressources ni de préserver notre environnement, même si nous observons l’émergence de nouvelles possibilités. Peu à peu les termes de “slow travel” et de voyage responsable font leur apparition dans le vocabulaire du voyage, qui englobent plusieurs notions. Mais l’objectif commun est clair : proposer des voyages qui limitent l’impact négatif sur l’environnement et ses populations, sans pour autant diminuer la qualité des expériences. Plusieurs leviers d’actions peuvent alors être mobilisés.

Voyager écoresponsable en empruntant des transports moins émetteurs

Voyager écoresponsable, c’est en premier lieu revoir son mode de transport car ce dernier reste le principal poste d’émission de CO²e* des voyages. D’après une étude de 2021 de l’ADEME, la mobilité est responsable de 77% des émissions de GES du secteur touristique avec 68% allouées au transport aller/ retour entre le point de départ et d’arrivée. Le transport aérien représente quant à lui 40% du total des émissions. Rappelons que selon le PNUE (Programme des Nations Unies pour l’Environnement), nous devrons dépenser moins de 3 tonnes de Co²e par an et par personne d’ici 2030 pour maintenir une planète en bonne santé. Actuellement, la moyenne est de 9 tonnes par personne et par an… Il est alors important d’avoir certains ordres de grandeurs en tête, car les 3 tonnes peuvent être très vite atteintes lorsqu’on sait qu’un aller/ retour de Paris à New-York émet environ 2 tonnes de Co²e par personne.

D’autres alternatives sont possibles pour se déplacer jusqu’à son lieu de vacances, et une fois sur place. Parmi celles-ci, le ferroviaire. Secteur peu émetteur, rapide lorsqu’on envisage des destinations françaises ou européennes, et confortable. Malgré des prix peu compétitifs en comparaison à l’aérien, le train n’a jamais eu autant le vent en poupe avec plus de 100 milliards de voyageurs par kilomètre en France en 2022. De nombreuses lignes sont en passe d’être réhabilitées et permettent d’atteindre la plupart des capitales européennes. De belles initiatives sont d’ailleurs régulièrement mises en place pour faciliter ces modes de transport. Par exemple, Greenpeace propose dans son Guide du voyageur des destinations accessibles facilement par les rails, en fonction de la durée du séjour. Et Ubiq, entreprise française, a mis en place le Temps de Trajet Responsable, qui a pour objectif d’offrir des jours de congés supplémentaires aux salariés optant pour des modes de transport écologiques comme le train ou le covoiturage.

Un peu plus sportif mais tout aussi plaisant, le voyage itinérant à pied ou à vélo séduit de plus en plus, comme en a témoigné Siméon Baldit de Barral lors de notre rencotnre Ceux Qui Font Demain pour la planète en novembre 2023. Des chemins mythiques comme St-Jacques de Compostelle aux chemins de Grande Randonnée (plus de 300 à travers le pays !) à parcourir à pied, et des itinéraires comme les véloroutes aux routes des vins à emprunter en vélo, il y a l’embarras du choix pour qui aime apprécier le paysage à son rythme.
Pour un week-end ou plusieurs semaines, il est alors possible de partir à l’aventure et de faire le plein d’agréables souvenirs. Il faut certes accepter de prendre le temps de se rendre sur son lieu de vacances, mais pourquoi ne pas considérer le déplacement comme faisant partie du voyage lui-même ? Des trains mythiques comme l’Orient Express, le Glacier Express ou encore le Transsibérien sont d’ailleurs proposés comme des expériences à eux seuls.

Les activités sur place

Moins émettrices de gaz à effet de serre, les activités pratiquées sur le lieu de vacances ont tout de même un rôle important à jouer notamment dans le rapport que les vacanciers entretiennent avec leur environnement. Outre passer du temps au bord de la piscine, à la plage ou en terrasse, les vacances sont aussi l’occasion de partir à la découverte des surprises de la nature, des spécialités locales et de l’histoire des régions. C’est aussi cela voyager écoresponsable

Se connecter au vivant, aux coutumes, à la culture par le biais d’expériences immersives et de rencontres sont autant de manières de s’ancrer dans la réalité et d’apprécier les patrimoines naturels et culturels. Vous pourrez donc partir à la rencontre des artisans, des fermes du coin, visiter un château, un moulin, partir en randonnée, apprécier un point de vue, une cascade… Ce type d’activités est donc enrichissant d’un point de vue personnel, mais permettent de comprendre ce qui nous entoure. Et comme l’a très bien évoqué Baba Dioum, un ingénieur forestier sénégalais, nous ne protégeons que ce que nous aimons et nous n’aimons que ce que nous comprenons.

A un autre niveau, la microaventure permet de s’essayer à des activités sportives ou de loisir le temps d’un court séjour, pour découvrir les environs, se déplacer et déconnecter de nos habitudes. Que ce soit le VTT, la randonnée, le canoë ou même le voilier, ce sont de belles manières de partir à la rencontre de son environnement sans altérer les écosystèmes. En effet, plus les modes de locomotions et les activités sont silencieuses, non polluantes, lentes et plus nous nous intégrons aux merveilles de la nature. Car le but ultime, en voyage et au quotidien, est bien de comprendre que nous faisons partie d’un tout, que nous nous devons de préserver.

Le voyage en hors-saison est également une possibilité intéressante, afin de désengorger les sites sur-fréquentés et préserver les environnements souvent fragiles. Les sites subissant de fort afflux touristiques le sont bien souvent pour une raison, c’est qu’ils se distinguent par une caractéristique naturelle peu commune et donc précieuse. Par exemple, les falaises d’Étretat, le parc national des Calanques ou encore Venise pour dépasser les frontières. D’ailleurs, les gestionnaires de ces sites exceptionnels ont dû restreindre les accès afin de les préserver (limite des capacités, entrée payante…).
Aussi intéressant soit-il de se consacrer à des activités naturelles et locales, il peut également être envisagé de simplement faire moins, en privilégiant la qualité à la quantité et accorder du temps à la contemplation, la promenade, le repos…

Les hébergements

Pour voyager écoresponsable, les hébergements sont aussi à repenser. Indispensable de nos vacances, l’hébergement représente 7% des émissions du secteur d’après l’étude de l’ADEME de 2021. Des variables comme le niveau de consommation énergétique, l’isolation thermique, l’alimentation… vont majoritairement permettre de jauger la durabilité d’un hébergement. Il n’est cependant pas évident en tant que consommateur de savoir où nous posons nos valises, car les données ne sont pas souvent accessibles et difficilement vérifiables. Des moteurs de recherche comme Airbnb ou Booking sont très populaires et dominent le marché, alors qu’ils ne permettent pas toujours d’accéder à une offre d’hébergement respectueux de l’environnement et de la vie locale et donc de voyager écoresponsable. Ils sont même parfois au cœur de discordes quant à leur impact social, réquisitionnant une partie des logements qui pourraient être mis à disposition des populations dans le besoin.

Cependant, l’offre d’hébergements locaux et responsables est croissante, notamment en France mais pas seulement. Pour n’en citer que quelques-uns, des sites comme GreenGo, Bedycasa ou encore les Oiseaux de passage proposent un large choix d’hébergements insolites, respectueux de l’environnement et souvent dans des cadres préservés. L’expérience proposée par ce type de plateforme se veut intimiste et unique, pour le plus grand bonheur des utilisateurs.
Un certain nombre de labels existent, avec pour vocation de garantir aux voyageurs des hébergements bas carbone. Or, comme pour beaucoup de labels, il faut se renseigner au préalable afin de savoir quels sont les critères nécessaires pour que les hébergements puissent les obtenir et si cela correspond aux exigences environnementales. Parmi les plus sérieux, nous pouvons citer Clef Verte, l’Abeille Verte, Green Destination… Chacun possède son propre champ d’action et propose un large choix d’hébergements alternatifs.

voyager écoresponsable

A travers ces différents points, composants majoritaires des voyages, nous avons vu qu’il est tout à fait possible d’envisager des vacances au faible impact environnemental, tout en ne négligeant ni la qualité ni l’expérience.
Il peut être nécessaire de penser quelque peu autrement et d’accepter de prendre le temps, mais cela n’entrave aucunement la déconnexion, si chère à tous les voyageurs en quête de nouveaux horizons.

D’après Robert Louis Stevenons, écrivain écossais et célèbre voyageur, l’important ce n’est pas la destination, c’est le voyage. Voyager en train, à pied ou en vélo, se promener, contempler, faire des rencontres permet d’apprécier pleinement la beauté des paysages et de se rendre compte véritablement de l’espace-temps dans lequel nous sommes. La finalité d’un vrai voyage serait alors de nous faire évoluer, réfléchir, changer nos perceptions, apprendre, découvrir… Une sorte de voyage initiatique ! En solo, en duo ou en famille peu importe du moment que l’important reste le moment présent.

Beaucoup de plateformes mettent en avant des offres de voyage bas carbone, axées sur la nature et les expériences locales plutôt que sur le complexe touristique de base encore très présent dans les esprits et sur les marchés. La tendance du nudge, un concept issu des sciences du comportement, est intéressante à appliquer au tourisme, car elle induit une suggestion plutôt qu’une injonction. L’idée est de ne pas faire agir sous la contrainte, mais de développer de manière implicite de nouvelles attentes pour un tourisme plus local et plus vert. Dans ce sens, il est essentiel de développer une offre de tourisme de proximité, complète et intéressante économiquement, et de la porter à la connaissance des voyageurs. Les canaux de communication plus personnels comme les réseaux sociaux et les blogs sont tout à fait adaptés pour mettre en avant ce tourisme alternatif. De plus en plus d’influenceurs développent des lignes éditoriales en faveur du tourisme responsable et montrent qu’il est possible (et très intéressant) de voyager autrement. Guillaume Payen par exemple ou Bruno Maltor méritent d’être cités.

*CO²e > prend en compte tous les gaz responsables du réchauffement climatique

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